jeudi 19 juin 2014

Les catacombes de Paris (Paris - France)


Près de trois cents kilomètres de galeries s'étalent sous Paris intra-muros, sur parfois trois niveaux de carrières. La profondeur moyenne est d'environ vingt mètres sous le niveau du sol naturel. Lorsque ces carrières étaient actives, on en extrayait de la pierre à bâtir, qui a permis pendant plusieurs siècles de construire les bâtiments de Paris sans importer d'autre matériau de construction. À la fin du XVIIIe siècle, pour faire face à la saturation des cimetières parisiens et aux problèmes croissants d'insalubrité, la décision est prise de déplacer les ossements dans une partie des carrières situées hors de la barrière d'Enfer du mur des Fermiers généraux, sous la plaine de Montsouris, appartenant alors au territoire de Montrouge.

Le cimetière des Saints-Innocents apparaît au Ve siècle autour de l'église Notre-Dame-des-Bois. Situé entre la rue Saint-Denis, la rue de la Ferronnerie, la rue de la Lingerie et la rue Berger, il reçoit pendant treize siècles des dizaines de générations de Parisiens, décédés dans les vingt-deux paroisses de la ville, ainsi que les cadavres évacués de l'Hôtel-Dieu et de la morgue. D'un petit cimetière de campagne, il devient le plus grand cimetière de Paris, et est progressivement entouré de constructions, jusqu'à devenir partie intégrante d'un des quartiers les plus animés de la ville. Les guerres, les épidémies ou les famines apportent leur lot de milliers de cadavres à inhumer dans cet espace restreint, ce qui rend leur décomposition de plus en plus difficile. Les fosses communes atteignent alors plus de dix mètres de profondeur. À la fin du XVIIIe siècle, le sol du cimetière se situe en conséquence plus de deux mètres au-dessus du niveau de la rue, entraînant des problèmes d'insalubrité, dénoncés de longue date.

La décomposition sans cesse renouvelée de milliers de cadavres favorise la propagation de maladies. Dès 1554, des médecins de la faculté de Paris s'indignent en vain contre les risques d'épidémies que fait peser l'existence du cimetière. En 1737, des médecins de l'Académie royale de sciences confirment cette analyse et les plaintes des riverains ne font que s'accumuler au fil des ans. Si les inhumations individuelles ne dépassent pas deux cents par an, les fosses communes, en revanche, accueillent jusqu'à mille cinq cents cadavres. Elles sont périodiquement vidées afin de faire de la place lors de la création de nouvelles fosses, et les ossements placés dans d'immenses charniers entourant le cimetière. Le dernier fossoyeur, François Pourrain, estime avoir enterré aux Innocents environ quatre-vingt-dix mille cadavres en moins de trente ans.
Un chroniqueur du XVIIIe siècle note que dans le quartier, le vin tourne au vinaigre en moins d'une semaine et que la nourriture se gâte en quelques jours. L'eau des puits est elle aussi contaminée par des matières putrides, la rendant de plus en plus impropre à la consommation. La situation amène même Voltaire à critiquer les autorités religieuses, qui persistent à enterrer des morts de façon aussi inconséquente pour la santé du peuple. En 1765, un arrêté du Parlement de Paris interdit toute inhumation dans les limites de la ville. Huit cimetières sont alors créés hors des murs de la capitale, renouant avec les traditions romaines. Mais la tradition, la résistance des autorités religieuses et la piété populaire empêchent de venir rapidement à bout de ces pratiques.

Début 1780, de curieux phénomènes sont signalés dans les caves environnantes des Innocents : les exhalaisons provenant de la décomposition des cadavres sont si importantes qu'elles filtrent à travers les murs et éteignent les chandelles de suif. Il est alors décidé d'enduire de chaux les murs des caves du quartier. Mais le 30 mai de la même année, un incident spectaculaire marque la gravité du problème et entraîne enfin une prise de décision : le mur d'une cave de la rue de la Lingerie, contiguë au cimetière, cède sous la pression des milliers de cadavres contenus dans une fosse commune.

Antoine-Alexis Cadet de Vaux, inspecteur de la salubrité de la Ville de Paris, fait aussitôt emplir de chaux vive puis murer la cave et ordonne la fermeture définitive du cimetière. Alors fermé et interdit au public durant cinq ans, le cimetière est laissé à l'abandon et tombe dans un relatif oubli. Si les inhumations sont à nouveau interdites dans Paris intra-muros, aucune solution n'est en revanche trouvée concernant les émanations issues des cimetières désaffectés.

En 1782, un projet anonyme publié à Londres et présenté aux autorités de la Ville de Paris ainsi qu'aux ecclésiastiques propose une solution originale au problème : s'inspirant des nécropoles souterraines antiques, cet opuscule anonyme en vente dans les magasins de nouveauté suggère de profiter des consolidations réalisées depuis plusieurs années par l'inspection générale des carrières pour installer un ossuaire dans une ancienne carrière souterraine.

Après de multiples débats, le projet est finalement approuvé. Un arrêt du Conseil d'État du 9 novembre 1785 décide la suppression du cimetière des Innocents avec évacuation des ossements, puis son réaménagement en marché public. Le nom de Catacombes est donné aux carrières aménagées, par analogie avec les anciennes nécropoles souterraines de Rome, même si les lieux n'ont jamais servi de sépulture directe et n'ont aucun caractère sacré. Durant toute son existence, plus de deux millions de parisiens sont inhumés au cimetière des Innocents.


Dès les derniers mois de 1785, les transferts d'ossements à partir du cimetière des Innocents commencent. Les ossements sont progressivement retirés des charniers ainsi que du sol, puis nettoyés et entassés à l'aide de fourches dans des voitures closes. Un rite religieux scrupuleux est respecté.

Le 7 avril 1786, les Catacombes sont bénies et consacrées par les abbés Motret, Maillet et Asseline, ministres de la Religion, en présence d'architectes (Legrand, Molinos) et de l'Inspecteur Général des Carrières de Paris Charles-Axel Guillaumo. Le transfert dure quinze mois, et l'opération est un succès. L'administration choisit en conséquence de généraliser la mesure : suivant l'exemple des Saints-Innocents, les autres cimetières parisiens, en particulier ceux accolés aux églises, sont peu à peu vidés à leur tour jusqu'en janvier 1788 et supprimés. L'opération se poursuit de 1787 à 1814.

Ce sont ainsi dix-sept cimetières, cent-quarante-cinq monastères, couvents et communautés religieuses et cent-soixante lieux de cultes entourés de leur propre cimetière qui alimentent les carrières souterraines.


 Dès leur création, les Catacombes suscitent la curiosité.

Le 2 avril 1897, un insolite concert clandestin est organisé dans les Catacombes et va défrayer la chronique. Une centaine de convives du monde parisien reçoivent un énigmatique billet d'invitation, les conviant à se présenter à onze heures du soir devant l'entrée de l'ossuaire, rue Dareau. Ils sont priés de ne pas faire arrêter leur voiture à cette adresse pour plus de discrétion. Le billet commence ainsi : « Monsieur..... est prié d'assister au concert des catacombes, organisé par MM. Pierres et Jouaneau, à onze heures. » À minuit, un orchestre composé de quarante-cinq excellents musiciens, recrutés parmi les artistes de l'Opéra, exécute plusieurs morceaux de circonstance, dont la Marche funèbre de Chopin, la Danse Macabre de Saint-Saëns, la Chorale et marche funèbre des Perses, Aux catacombes, un poème de M. Marlit, récité par son auteur, et enfin la Marche funèbre de la Symphonie Héroïque de Beethoven. Le concert s'achève à deux heures du matin. Des ossements sont dès lors placés empilés entre les piliers afin que ne se reproduise ce type de manifestation.


Le parcours de visite, long de deux kilomètres, nécessite au moins quarante-cinq minutes. Les catacombes se présentent sous la forme de tunnels, à l'intérieur desquels la température est constamment de 14 °C. Elles disposent de 130 marches descendantes et 83 montantes.


Le visiteur débouche alors dans la galerie de Port-Mahon. Ces sculptures réalisées dans la pierre de 1777 à 1782, sont l'œuvre d'un carrier nommé Décure, dit Beauséjour, vétéran des armées de Louis XV. Travaillant la journée aux travaux de consolidation sous la direction de Guillaumot, il sculpte après son travail et représente une maquette ainsi que diverses vues du fort de Port-Mahon, la principale ville de l'île de Minorque, aux Baléares.



Ensuite, les ossements de six millions de Parisiens reposent dans approximativement 780 mètres de galeries tortueuses,  dont de nombreuses célébrités de l'histoire de France inhumées à Paris. Mais leurs dépouilles ont rejoint celles de millions de Parisiens anonymes et à ce jour, aucune n'a pu être identifiée.

De l'église Saint-Paul, proviennent les restes de Rabelais, François Mansart, Jules Hardouin-Mansart, l'Homme au masque de fer ou encore Jean-Baptiste Lully. De Saint-Étienne-du-Mont sont transférés ceux de Racine, Blaise Pascal et Marat, de Saint-Sulpice Montesquieu ; du cimetière Saint-Benoît, ceux de Charles et Claude Perrault, ainsi qu'Héricart de Thury, oncle de Louis-Étienne, l'inspecteur des carrières. Du cimetière de la Ville-l'Evêque proviennent les corps des mille gardes suisses massacrés aux Tuileries en 1792 ainsi que les 1343 personnes guillotinées au Carrousel ou place de la Concorde entre 1792 et 1794, dont Charlotte Corday. Avec le transfert des ossements du cimetière des Errancis sous la Restauration, Danton, Camille Desmoulins, Lavoisier et Robespierre ont également rejoint les Catacombes.
À titre plus anecdotique, deux curiosités sont à souligner : le poète Gilbert, enterré au cimetière de l'Hôtel-Dieu dit de Clamart, a été transféré dans les Catacombes lors de son évacuation. Il se trouve ainsi noyé dans la masse alors qu'un monument en forme de tombeau célèbre sa mémoire. Le martyr saint Ovide, inhumé dans les catacombes de Rome, a été ramené à Paris par le pape Alexandre VII. Ses restes ont été placés au couvent des Capucines, dont les ossements ont été transférés dans l'ossuaire le 29 mars 1804. C'est ainsi le seul personnage à avoir été inhumé dans deux catacombes.


Les Catacombes de la Tombe-Issoire sont les plus célèbres et attirent de nombreux visiteurs. Mais d'autres ossuaires existent sous Paris. Inaccessibles au grand public, ils demeurent particulièrement méconnus.
Le paranormal ici est suggéré mais pas une évidence.Je n'ai découvert aucune photo sur le net démontrant la présence de fan tome dans les catacombes. mais c'est un lieu culte, qui mérite d'apparaitre dans cette partie du blog.


J'ai eu le plaisir de visiter cet endroit et ce poste a été réalisé avec des photos personnelles.
De prime abord, l'atmosphère y est oppressante, puis plus on s'aventure dans les galeries et plus l'ambiance y est curieusement sereine. J'ai même avec surprise, constaté que dans la dernière pièce, se trouvait des chaises et des bancs et certaines personnes s'adonnaient à la lecture.On a du mal a en partir.... C'est vrai.

Si certain d'entre vous sont de passage en Ile de France et friand des légendes parisiennes, je vous invite a aller faire un tour au Manoir de Paris.... 13 contes et légendes (des catacombes, au barbier de Séville en passant par le crocodile des égouts) y sont racontés, scénarisés par des acteurs très talentueux. Le prix de l'entrée y est très raisonnable, au vue du frisson que provoque cet endroit.

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